Cinéma | Nouvelles du front

Django Unchained
un film de Quentin Tarantino (2012)

Django Unchained - Quentin TarantinoMarquant le retour en forme de Quentin Tarantino après une décennie consacrée à un ego-trip sous forme de films au mieux qualifiables de médiocrité, Django Unchained constitue la première bonne surprise cinématographique de 2013. Malgré un laxisme agaçant qui se fait ressentir à la fois dans un scénario décousu et une mise en scène souvent hasardeuse, cette relecture du western spaghetti offre un agréable moment de divertissement dépourvu de la prétention qui a parfois tendance à miner son travail. Pourquoi dis-je agaçant ? Car avec ses trois premiers films, Tarantino avait démontré qu’il était capable du meilleur. Au lieu malheureusement de perfectionner son indéniable talent pour la narration visuelle et d’effacer un maniérisme devenu fatigant à la longue, notamment cette lassante tendance à fétichiser ses stars et la multitude de références qu’il aime à glisser dans ses récits (les entrées en scène de Samuel L. Jackson et DiCaprio, l’utilisation du zoom, la rose blanche empruntée à El Mercenario…), avec ses films suivants il a opté pour la solution de la facilité en resservant simplement au public ce qui était attendu de lui. Django Unchained me réconcilie donc quelque peu avec le réalisateur de Jackie Brown car, si l’on s’agace encore de temps à autre, l’on s’amuse aussi à hauteur égale ce qui n’était pas le cas de ses deux purges les plus récentes. Christoph Waltz est impeccable de cabotinage et vole souvent la vedette à ses partenaires de jeu, Leonardo DiCaprio campe avec brio l’ignominie de son affreux personnage et l’on savourera la succincte rencontre entre Jamie Foxx et Franco Nero, le Django de Sergio Corbucci (Le vrai, l’unique ! crieront certains).

Jamie Foxx et Franco Nero dans Django Unchained de Quentin TarantinoAu vu des propos consternants de bêtise tenus récemment par Quentin Tarantino à l’égard de John Ford, le film fait bien de ne pas s’engouffrer dans le piège de la question raciale. Elle est soulevée, inévitablement, mais ne reste au final qu’une des nombreuses toiles de fond qui, à l’image de La Chanson des Nibelungen, ne seront jamais creusées en profondeur. Autre source d’étonnement, pour une grande partie du film la violence est là où on l’attendait le moins ; dans le hors-champ. Tarantino détourne explicitement le regard du spectateur à des instants-clefs et fait preuve d’une pudeur renvoyant à la célèbre scène de torture de Reservoir Dogs. Retardant l’éclatement de la violence pendant une bonne partie du film, les ultimes bains de sang grandguignolesques n’en deviennent que plus jouissifs bien qu’une fois de plus la mise en scène pêche ici par un décevant manque de dynamisme. Résultat mitigé donc pour ce Django Unchained qui, bien que regorgeant d’idées intéressantes – le recyclage du Mandingo de Richard Fleischer (1975) en tête – reste qualitativement bien en-deçà de ce que Tarantino a pu nous offrir de mieux par le passé. A voir tout de même bien que l’on aimerait qu’il comble réellement un jour les attentes qu’il avait suscitées autrefois chez les amateurs de cinéma de genre.

4 personnes ont commenté l'article

  1. J’aime bien Tarantino mais somme toute, ce n’est pas (du tout) un réalisateur culte pour moi. D’aucuns (très rares) m’auraient quand même fait aller voir un western. Lui non donc…

    Un truc que je me demandais: tu as vu « Before Sunrise » et « Before Sunset »? J’ai l’impression qu’on en a déjà parlé mais ma mémoire de poisson rouge me joue encore des tours.

    1. Le mot culte est tellement galvaudé qu’il en a perdu tout sens. Tarantino a fait deux premiers films sympathiques et avec Jackie Brown a démontré qu’il pouvait faire quelque chose de vraiment bon mais par la suite il n’a fait que répéter ce qu’on attendait de lui. Si Kill Bill était encore regardable, bien que beaucoup trop long dans son ensemble, Boulevard de la mort et Inlgourious Basterds étaient franchement mauvais. C’est dommage, il a le talent pour faire de très bons films mais il est trop imbu de lui même pour voir quand ce qu’il fait n’est pas à la hauteur.

      Before Sunrise et Before Sunset, je ne les ai jamais vus et honnêtement je n’ai aucune envie de les voir. Ce n’est pas spécialement à cause du réalisateur, des acteurs ou de l’histoire, il y a juste quelque chose qui me rebute à l’idée de ces films.

    1. Je pourrais pas l’expliquer, c’est un sentiment viscéral. C’est juste le genre de film où j’ai la certitude que je ne vais pas aimer. Par contre je viens de voir Amour et j’ai été assez déçu. Le sujet est traîté avec honnêteté, ça je le sais, mais je ne vois tout simplement pas quel film Haneke a voulu faire, plus précisément pour moi il n’y a vraiment pas de film et du coup ça tombe à plat, ce n’est pas émouvant, c’est un peu poseur et je n’en comprends pas franchement l’intérêt.

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